samedi 26 novembre 2016

L'Ange Bleu

Comment sait-on que Noël va venir ? On ne peut pas le voir avec les yeux, car les jours et les nuits sont comme toujours, et les hommes vivent et s'occupent de leurs affaires comme d'habitude. On ne peut pas l'entendre avec les oreilles car se sont toujours les mêmes bruits qui résonnent : les autos, les avions qui passent, les enfants qui crient et ainsi de suite.
Et pourtant quatre semaines avant Noël il se passe quelque chose de très important : un grand ange descend du ciel pour inviter les habitants de la terre à préparer Noël. Il est vêtu d'un grand manteau bleu tissé de silence et de paix. La plupart des gens ne le remarquent pas car ils sont très occupés à autre chose. Mais l'ange chante d'une voix profonde et seulement ceux qui ont un cœur attentif peuvent l'entendre.
Il chante : "le ciel vient sur la terre, la beauté divine vient habiter le cœur des hommes. Faites y attention ! Ouvrez lui la porte !"
C'est aujourd'hui que cet ange passe et parle à tous les hommes. Et ceux qui l'entendent se mettent à préparer Noël, en chantant des chants et en allumant des bougies...

Conte raconté aux enfants dans la pédagogie Steiner pendant la période de l'Avent.

vendredi 21 octobre 2016

"Faire ce qu'il faut puis laisser faire"


"La joie est partout sous le ciel, cherche celle qui répond à ton coeur"
Su Zhe
 
.
Il y a des moments de profondeurs incontournables rencontrés à travers nos épreuves de vie (douleurs physiques et émotionnelles, doutes, tristesse, remise en question) où les prises de conscience se font plus aiguës. Ces instants-là nous invitent, à l'image de la nature qui meurt en automne et renaît au printemps, à vivre de petites morts intérieures et symboliques afin de quitter l'ancien pour renaître au nouveau, sans jamais rompre le pacte de confiance avec la Vie.


 
" Faire ce qu'il faut puis laisser faire"
Il ne s'agit pas de fatalisme ou de démission, mais de confiance.
Se libérer de tout désir stérile, laisser la rivalité en chemin, apprendre à consentir à l'exigence de la
vraie  Vie : rester humble devant les mouvements de l'âme comme un serviteur devant un plus grand que soi. Je traversais une période de doute. J'avais perdu confiance et le moment n'était pas heureux. Ce caractère s'est imposé comme une nécessité  vitale. Je devais retrouver la paix, signer une nouvelle fois le pacte de confiance.
L'idéogramme est empreint d'une tension presque antagoniste. Un équilibre précaire s'établit entre les signes ; l'harmonie vient de l'apparente dissonance des formes et de leur secrète résonance. En traçant, ce caractère, j'ai éprouvé le besoin de me restituer dans l'ordre de la création.
Et le souffle devient signe, François Cheng, p.94, l'iconoclaste.

mardi 18 octobre 2016

L'écureuil et l"arbre rêveur

Quelques fois des graines oubliées, que l'on avait semées dans les temps passés, avec amour, donnent soudain des fruits inattendus mais magnifiques.

L'écureuil et la feuille

Un écureuil, sur la bruyère,  
Se lave avec de la lumière.
Une feuille morte descend,
Doucement portée par le vent .
Et le vent balance la feuille
Juste au dessus de l'écureuil;
Le vent attend, pour la poser,
Légèrement sur la bruyère,
Que l'écureuil soit remonté
Sur le chêne de la clairière
Où il aime à se balancer
Comme une feuille de lumière.
Maurice Carême



La feuille

Il était une feuille qui, ce matin, est tombée sur le bas de ma fenêtre.
La feuille venait de l'arbre rêveur.
L'arbre rêveur était un arbre magique.
Il avait le pouvoir de se rappeler de tous les rêves des enfants.

Auréane, 8 ans, le 18.11.16.

dimanche 2 octobre 2016

A long way...a long life


Is he a poor lonesome cow-boy ?

En s'appelant, Chance Chanceuse, Lucky Luke ou Luck, ne peut être finalement que le garçon le plus cool sur cette planète. De quoi a-t-il peur ?  Il tire plus vite que son ombre, qu'il a totalement apprivoisée au point même d'avoir pris le dessus sur elle. Il a un cheval, Jolly Jumper, qui se poile à se rouler par terre si le coeur lui en dit. Il s'est donné une direction et il s'y tient.  Pour lui, ce qui compte c''est sa mission, celle qu'il sait juste au fond de lui.  C'est un solitaire, mais il en connaît tous les secrets parce qu'en fait il a accepté d'être un homme libre et universel. Son universalité, il n'en parle jamais car il a compris que c'est dans le secret qu'elle sera le mieux protéger. Il a accepté de devenir le justicier des causes perdues et il s'amuse de loin avec ses gredins d'ennemis pour qui il a une affection sincère. Il ne veut pas se l'avouer mais, dans son monde, en fait, il a une chance inouie : les bons sont bons, et les méchants toujours méchants. Aussi, est-il certain des liens qui se tissent entre les personnages de sa vie. 
A la fin de chaque histoire, il reprend son chemin sans hésitation, sans attache et sans illusion. Il sait que le chemin se poursuit ainsi, regardant avec Jolly jumper le coucher de soleil au loin vers ses lointaines montagnes. Ce solitaire légendaire est en fait un grand sage. Il a tout compris des méandres de la vie, il reste fidèle dans son coeur et n'avoue jamais à qui il appartient. C'est mieux ainsi, car il est sûr de ne pas trahir. Pour Lucky Luke, la loyauté est un point d'honneur et elle n'a pas de prix. Il sait pourtant qu'il lui faut parfois s'approcher d'histoires tordues et dangereuses mais il n'aime pas jouer sur deux tableaux à la fois. De jour comme de nuit, il est égal à lui-même, il ne joue aucun rôle à part le sien. Son esprit pionnier et aventurier l'a poussé à croire au soleil qui se couche dans le far west. Oui, il croit à la vie et il veut qu'elle circule le plus vite possible ; par poney express, par télégraphe et aussi by train. C'est un homme sans frontière, profondément humain, cela se voit car il est toujours fair-play. On aime sa mèche qui tombe sur ses yeux pour cacher ses moments d'émotions et aussi les cliquetis de ses étoiles accrochées à ses bottes qui nous rappellent sa nature, un vrai cow-boy. Les cows-boys,  en principe, ils sont souvent rustres à l'image des saloons malfamés. Mais lui, pas du tout, on sent en lui se dissimuler une subtilité hors du commun et une finesse de circonstances pour analyser les situations.  Ce qui est désolant, c'est qu'il a toujours une cigarette aux lèvres, il fume certainement trop. Mais pourquoi ? Peut-être n'entend-t-il pas la tristesse de ses poumons ? C'est sûrement son seul défaut.  Cette tristesse, il ne veut pas s'en occuper car il a une bien trop grande profondeur, il n'en retrouve pas souvent un écho dans ce monde. Aussi, se retire-t-il  très vite dans ses montagnes solitaires, car là-bas, dans le silence, il entend la réponse, celle qui le réconforte, qui ne le déçoit jamais. Il revient toujours, cependant, car sa mission n'est pas encore achevée et elle a encore tellement de choses à lui apprendre.

A long way...a long life...

samedi 1 octobre 2016

La réponse d'Elvire



 Une magnifique lettre reçue le 30.09 qui m'a beaucoup touchée et que l'auteure m'a autorisée à partager. Je la remercie car elle donne du sens.
 Chère Native,
Votre lettre portée par les anges est arrivée jusqu’à ma lointaine retraite, j’entends bien votre appel à ma personne lancé par-delà les espaces et par de-là le temps et je vous remercie de venir ainsi me déranger. Votre voix est la claire musique d’un ressac qui bat depuis longtemps mes murailles de pierre. Ainsi, le va et vient des vagues, laisse à travers vos mots, émerger son limpide message. Il est une invitation et ma plume vous y répond. Vous m’invitez à revenir au monde, à reprendre conscience du mouvement et du flux de vie qui traverse mes fibres. Et vous avez raison. Sur cette scène où chaque jour se lève, il me faut désormais m’aventurer dans la lumière et donner la réplique. Je ne pouvais cependant m’y résoudre sans y avoir été invité. La porte du couvent est lourde à pousser et l’obscurité devenue rassurante, les doutes nous retiennent comme des racines profondes et chaque pas, croyez-le est un arrachement. Mais dehors, je l’entends, le vent bruisse dans les arbres, l’eau murmure et la vie bouge comme une tâche de soleil dans le sous-bois. C’est une jeune femme qui était entrée en ces lieux de recueillement, c’est désormais une vieille âme qui revient. Vieille, parce que le temps a accompli son œuvre, vieille parce que l’errance au labyrinthe fut longue, vieille encore, de tout ce qu’il a fallu perdre, la beauté, la jeunesse, l’or brillant du désir, l’insouciance légère, jusqu’au  plus ténus des espoirs, jusqu’à la poussière des rêves. C’est une femme usée qui entre en scène, dont la marche est incertaine et la parole faible. Elle n’a jamais été aussi pauvre, et pourtant, elle n’a jamais été aussi riche. Cependant, cette richesse est encore enfermée dans un coffret dont elle a perdu la clé. Mais l’autre n’est-il pas une clé ? L’invitation n’est-elle pas déjà une ouverture ? Ce couvent, ce lieu de recueillement n’est-il pas déjà dans le monde de toute éternité ? Vous écrivez à une morte et c’est une vivante qui répond car la Vie contient toute chose, même la mort. Chaque fois que l’on tend la main, c’est le vivant qui l’attrape car le vivant veut vivre. Nous finirons tous par pousser la lourde porte pour laisser sortir l’être blessé, trahi, humilié et vaincu. L’être défait. Cette défaite n’est pas un échec, en vous le disant, c’est à moi-même que je le dis, cette défaite n’est pas une victoire, c’est l’abandon des attachements et des illusions, cette défaite est notre liberté.

L’ancienne Elvire adopte un nouvel ordre, car désormais Elle revit !
Bien à vous et merci

lundi 19 septembre 2016

Lettre à Elvire

D'après la tirade de Done Elvire, abandonnée et trahie par Don Juan, acte IV, scène 6, lorsqu'elle revient le voir, lui dit  qu'elle lui a pardonné et qu'elle s'inquiète pour lui mais qu'elle n'a d'autres choix que de s'enfermer dans un couvent. 

Chère Elvire,

Festival d'Avignon juillet 2016
Quel âge avez-vous aujourd'hui ? Vous vous êtes retirée du monde mais vos mots y résonnent encore. 
 Vous êtes tombée dans les travers de l'illusion. Mais est-ce condamnable au point de vous priver de la beauté autour de vous ? Nous sommes ici et nos vies nous offrent une scène parfaite où se jouent acte par acte, les situations que nous choisissons d'expérimenter. Ainsi, vous avez exploré la trahison et l'abandon. L'illusion vous a portée dans vos rêves les plus fous et vous avez pris le risque d'aimer. Non, vous n'êtes pas aussi naïve qu'il n'y paraît, vous avez simplement accepté de vivre, pour ressentir de l'intérieur la folle envie de croire les mots qui vous ont touchés. C'est humain et par essence imparfait, mais si prometteur d'avenir. Vous avez cru à l'amour et à son don sincère, ce n'était pas une erreur juste un chemin, le vôtre. Mais que vous fallait-il faire pour être aimée dans ce monde ? Il y avait un voile devant vous et vous n'avez pas compris la scène qui se déroulait. C'est aussi une erreur que de projeter sur l'autre un idéal d'amour absolu auquel on aspire en secret. On ne peut qu'être déçu mais cela aide à comprendre que cet amour-là n'est pas humain mais divin. On y trouve alors  une ouverture qui rapproche de ses profondeurs, permet d'y plonger et d'y rencontrer la lueur d'espoir qui change tout et vous montre  une autre route.

Pour Don Juan, la vie est un théâtre d'expériences et tout y est permis. Il explore les infinies possibilités du libre arbitre et ignore toutes les règles de moralité. C'est une possibilité. Chacun en ce monde choisit ses valeurs. Cependant, peut être cela vous aiderait-il d'entendre que votre trahison est aussi la sienne. Votre abandon est aussi le sien. En effet, ce sont sa loyauté, sa sincérité  et sa décence qu'il abandonne. Il ignore la réciprocité de l'amour et slalome entre  l'euphorie et la frustration, entre la manipulation et la destruction, entre sa vie et sa mort qu'il défie sans cesse. Pourtant, il y a quelque chose de bon en lui, d'honorable, il peut sans réfléchir sauver la vie d'un homme, et votre frère en est témoin. Alors quel est ce mystère ?  En somme, comprenez-vous, c'est la sienne de vie qu'il n'arrive pas à sauver. Vos mots résonnent, Elvire, parce que le renoncement vous a aidée. Vous avez  transformé votre attachement afin de  grandir dans l'amour sans condition, celui qui se place au-dessus de tout, qui élève l'âme et sacrifice le cœur. Vous l'aimez ainsi aujourd'hui et vous consacrez votre temps à penser à votre repentir et même à penser au sien. C'est une erreur. De nos jours, cet enfermement n'est plus nécessaire. Regardez vous avec bienveillance, regardez vous en amie, votre souffrance ne suffit-elle pas ? S'il avait su à quel point cela a été  difficile  de vous exprimer ainsi. S'il avait pu ressentir la violente douleur dans votre poitrine quand tout s'est révélé et s'il avait vu les larmes de votre cœur, peut-être aurait-il mieux compris ? L'amour amène à la compassion, et la compassion à la réparation. Il n'en a pas eu assez car il en a peu pour lui-même. A-t-il croisé ces fleurs pour qui, demeurer enfermer dans leur bourgeon, est plus douloureux que de fleurir mais dont la sensibilité est telle qu'elles peuvent se refermer devant la maladresse d'un papillon ? Ces fleurs là ne sont pas si rares, elles sont discrètes et secrètes. Elles se tapissent au fond
Compagnie la Carabela, comedia dell'Arte
de chacun de nous. Voilà ce qui se passe lorsqu'on blesse une personne, on abîme ses fleurs. On abîme  la vie dans ce qu'elle est de plus fragile et aussi de plus vivante. C'est l'énergie de vie que l'on renverse, que l'on immobilise dans la tristesse. Alors, de votre corps, il est nécessaire de reprendre conscience du mouvement, de reprendre conscience que tout ce qui y circule prouve qu'il est la vie même. Ne demeurez pas figée dans votre douleur. Vous avez pardonné alors pardonnez vous aussi pour toutes vos maladresses et laissez la vie vous retraverser,  laissez vos émotions danser et rencontrer l'authenticité. Prenez conscience, chère Elvire, qu'il s'agit en fait d'une danse, celle du déploiement de vos dons créatifs et intuitifs et revenez dans le monde pour y goûter la saveur du lendemain et de sa promesse d'avenir. 


Texte Inspiré après  la représentation au festival d'Avignon de Don Juan de la compagnie La Carabela ( juillet 2016). 
 Une tragi-comédie de Molière, inspirée de « El Burlador de Sevilla », pièce de l’auteur espagnol Tirso de Molina.
Mise en scène de Carlo Boso
Maitre d’armes : Florence Leguy
Chant: Sinda Elatri
Dance: Karine Gonzalez

https://www.facebook.com/lacompagnielacarabela/?fref=ts

vendredi 8 juillet 2016

L'éducation artistique et l'intelligence émotionnelle.


"L'empathie, autrement dit l'intelligence émotionnelle, a un rôle majeur dans la construction de la relation à l'autre. L'expérience esthétique nourrit l'empathie. (...) L'expérience esthétique et l'intelligence émotionnelle qu'elle contribue à forger ouvrent à la découverte des "infinis visages du vivant", pour reprendre ici les mots de René Char. L'éducation artistique permet de forger l'intelligence émotionnelle des enfants à l'opposé d'une conception des apprentissages qui exclut la sensibilité. Développer la dimension sensible des apprentissages et la part que l'écoute de la sensibilité peut apporter aux tâches de résolution de problèmes, de quelque nature qu'ils soient, devient un objectif majeur dans tous les champs de la connaissance."
L'art fait-il grandir l'enfant ? essai sur l'éducation artistique et culturelle, Jean-Marc Lauret, p.95 à 96.




L'intérêt est alors de s'ouvrir à l'ensemble des pédagogies, même alternatives et déjà expérimentées depuis de nombreuses années, qui ont donné des résultats et qui ont intégré dans la transmission de la connaissance ce processus artistique naturel qui explore le beau et le sensible.

mercredi 6 juillet 2016

L’art au quotidien : le rôle fondamental de l'art

L’art est un « outil éducatif » majeur qui permet de s’approprier les connaissances par l’expérience et la sensibilité. Puissants stimulants du plaisir d ‘apprendre, de l’intérêt, de la curiosité et de la concentration des élèves, l’art et ses pratiques sont générateurs de confiance en soi, d’esprit d’initiative, de désir de créer et d’intérêt pour la culture de l’humanité en général et de la société d'aujourd'hui.
Toutes les matières à l’étude sont ainsi abordées dans une perspective artistique et vivante, de telle sorte que l’enfant se lie aux activités, s’exprime, développe la relation à l’autre et à la culture, intègre profondément les notions apprises.
Dans la diversité des pratiques artistiques, chaque enfant peut trouver ses préférences, ses dons, ses défis et ainsi croire en ses potentiels.
Les arts de l’espace ou arts plastiques :
peinture, dessin, dessin de forme, modelage, sculpture…
Les arts du temps : musique, élocution, poésie, eurythmie, théâtre…
L’artisanat :
Les travaux manuels avec le tissu, la laine, le bois, l’argile, la pierre sont pratiqués hebdomadairement. Lors d’ateliers artisanaux, les élèves expérimentent le tricot, le feutrage, la vannerie, le tissage, le cartonnage, la reliure, la menuiserie…

samedi 16 avril 2016

À vous toutes, femmes du monde entier, mon salut le plus cordial !

Avec quelques amies récemment, nous évoquions la correspondance de Jean Paul II à Anna-Teresa Tymieniecka et le sens d'un tel échange.
Suite à notre effrénée fanfiction qui nous a révélé comment Victor Hugo aurait pu contribuer à sublimer la fin tragique d'Emma Bovary, on peut tout à fait comprendre sans jugement que Jean Paul II ait pu correspondre avec cette femme philosophe qui lui apporte un autre éclairage. Je suis tombée par hasard sur cette lettre de Jean Paul II pour la Conférence Mondiale de la femme à Pékin et elle m'a vraiment fascinée tellement elle est moderne, ouverte et sensible.
Pour ma part, un tel échange, avec une si haute spiritualité, évoque le lien des âmes soeurs qui doivent incarner dans ce monde une mission grâce à l'équilibre de leur polarité.
Je trouve cette lettre d'une grande beauté, au regard de la révélation de la correspondance, on peut mieux comprendre sa sensibilité. Elle apporte beaucoup de lumière, d'intelligence et c'est intéressant de pouvoir mieux comprendre sans chercher à dégrader des liens spirituels qui portent un amour bien au-delà de leur humanité.

Extrait de la lettre :  des mots encore d'actualités  compte tenu du chemin à parcourir aujourd'hui dans notre monde pour laisser le féminin prendre sa place :

(...) Le féminin réalise l'« humain » tout autant que le fait le masculin, mais selon une harmonique différente et complémentaire.
Lorsque la Genèse parle d'« aide », elle ne fait pas seulement référence au domaine de l'agir, mais aussi à celui de l'être. Le féminin et le masculin sont entre eux complémentaires, non seulement du point de vue physique et psychologique, mais ontologique. C'est seulement grâce à la dualité du
« masculin » et du « féminin » que l'« homme » se réalise pleinement. (...)



Intégralité de la lettre :
https://w2.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/letters/1995/documents/hf_jp-ii_let_29061995_women.html

mercredi 6 avril 2016

"Emma : ce double caractère de calcul et de rêverie qui constitue l'être parfait"." Beaudelaire


"... Madame Bovary se donne ; emportée par les sophismes de son imagination, elle se donne magnifiquement, généreusement, d'une manière toute masculine, à des drôles qui ne sont pas égaux , exactement comme des poètes se livrent à des drôlesses... cette femme, en réalité est très sublime dans son espèce , dans son petit milieu et en face de son petit horizon... en somme, cette femme est vraiment grande , elle est surtout pitoyable , et malgré la dureté systématique de l'auteur, qui a fait tous ses efforts pour être absent de son œuvre et pour jouer la fonction d'un montreur de marionnettes, toutes les femmes intellectuelles lui sauront gré d'avoir élevé la femelle à une si haute puissance , si loin de l'animal pur et si près de l'homme idéal, et de l'avoir fait participer à ce double caractère de calcul et de rêverie qui constitue l'être parfait"."

Charles Baudelaire, l'Artiste, 18 octobre 1857.
Sublime Beaudelaire qui résume nos quatre épisodes en 10 lignes. Aucune femme ne peut résister à cette citation. Il a tout compris. Emma Bovary est un homme, c'est la part féminine de Flaubert, tiraillé entre ses instincts et sa difficulté à accéder au spirituel qu'il cherche pourtant et Maupassant lui écrit ces mots : "Monsieur Flaubert, votre patron se nomme Saint Polycarpe, un Saint bien distingué. On dit partout que c’était un brave homme. Mais il paraît qu’il n’était pas très gai." Cependant, il n'a pas la sensibilité spirituelle que Victor Hugo rencontre pendant son exil à travers son exploration de l'inconnu. Aussi, faut-il ajouter que si Emma Bovary est un homme, nous sommes tout à fait conscientes que notre Flaubert et notre Hugo sont des femmes qui, certainement, n'ont fait que décrire leur part masculine et qui ont échappé au bovarysme. Mais cela nous a fait du bien d'avoir proposé à Emma, réhabilitée dans sa dignité, une autre fin possible, plus proche des valeurs de notre XXIe siècle.

jeudi 24 mars 2016

Le temps de la contemplation ou un bout du secret du monde

"Mon destin aura été de vivre célèbre et ignoré , je ne suis connu que de l'inconnu."
Victor Hugo

J'ai appris récemment que Victor Hugo avait été très critiqué par de nombreux hommes de lettres au cours du XIXe et XXe siècle (Jules Lemaître, Emile Faguet, etc.). Ils reconnaissaient la forme sans en saisir la profondeur du fond qu'ils trouvaient creux. Mais à travers, les mots d'Henri Guillemin, une vérité est rétablie : 

"La forme dépend du fond. La métaphore est la trajectoire" : Victor Hugo croit à une analogie entre le monde visible et le monde invisible.
C'est une méthode perforante pour atteindre le secret du monde.
Les mots sont la chair de l'idée et cette chair vit.
Mais le mot est aussi un son. Il y a le sens et le son. Le son d'un mot comporte autour de lui des harmoniques. Autour d'un mot, il y a une aura audible et cette aura possède une puissance de suggestion et d'évocation bien supérieure au simple pouvoir de désignation que le dictionnaire confère au mot."
 Je rajoute, pour ma part, pour tous ceux qui jugent trop vite la sensibilité d'un style qualifié "
de creux",  qu'ils devraient chercher la part d'invisible non perçue afin de ne pas passer à côté d'un bout du secret du monde : 

"Le coeur est la grande prunelle, il y a une pensée au-delà de la pensée. L'intuition est la vigie de la raison, l'espérance a les yeux plus ouverts que l'algèbre, il y a une opiniâtreté insubmersible du moi, et ce que je rendrais à la tombe je sais que ce n'est pas moi."
Victor Hugo.

Henri Guillemin conclut ainsi son exposé :
"Hugo a la même pensée que Pascal, même pensée que Rousseau : 
Si le spectacle de la nature n'indique pas que Dieu existe, il suffit à l'homme de rentrer en lui-même pour sentir, pour pressentir au moins qu'il a au fond de lui, au centre de lui, dans sa substance même une présence".