mardi 20 août 2019

Le UN ou l'équilibre Yin et Yang


 "Il n'y avait pas de contraire mais des contrastes ; le monde était une somme  d'impressions. Les forces contraires se combinaient, se succédaient, s'alliaient, se remplaçaient, s'harmonisaient comme le yin et le yang, le jour et la nuit, l'ombre et la lumière, la femme et l'homme. La vie évoluait à chaque instant, mais rien n'était définitif. Ce qui constituait l'existence des hommes, des animaux et des choses était mouvant. Le yin avait besoin du yang et le yang du yin pour maintenir l'équilibre"

Le maître, Patrick Rambaud, édition Grasset, janvier 2015.





samedi 17 août 2019


A force d’aimer
Les fleurs, les arbres, les oiseaux,
A force d’aimer
Les sources, les vals, les coteaux,
A force d’aimer
Les trains, les avions, les bateaux,
A force d’aimer
Les enfants, leurs dés, leurs cerceaux,
A force d’aimer
Les filles penchées aux rideaux,
A force d’aimer
Les hommes, leur rage de ciel,
A force d’aimer
Il devint, un jour, éternel

Maurice Carême




samedi 10 août 2019

L'amour de soi ou le reflet de l'âme ?

"Les surfaces réfléchissantes sont des pièges à Âme ou des portes ouvertes sur le monde de l'esprit".
Isha et Marc Lerner

Dans son livre, "Eros : l'amour qui comprend", Henning Köhler explique "qu'au moment de l'adolescence, parfois même dès 10 ans, le jeune ressent l’éveil de l’amour pour un autre être humain, généralement du sexe opposé. Il ne s’agit pas là de sexualité, davantage liée au corps ; mais d’une force qui naît en l’âme et que Henning Köhler appelle "force d’Éros", ce dieu grec de l’amour.
C’est la première fois - mais non la dernière - que la force d’Éros envahit l’être et le porte à aimer et à admirer un autre dont il découvre les qualités et pour lequel il se pare intérieurement et extérieurement. On peut appeler cette expérience l’intuition de l’être profond de l’autre, et cette "force d’Éros" stimule la créativité à la fois de celui qui aime et de celui qui est aimé".
  Pour Henning Köhler, cette source d’amour, de tendresse, constitue le fondement de la santé conçue non comme une absence de problèmes, mais comme la faculté de les assumer et de les faire évoluer. En revanche, quand le jeune, qui porte en lui l’aspiration à rencontrer dans la réalité un être qui corresponde à l’image idéale qu’il se fait de l’homme, voit cette aspiration refoulée par la réalité, des forces d’autodestruction et de destruction s’éveillent en lui, dues à la profonde déception qu’il éprouve. Aussi la réalité sociale est-elle profondément liée à la possibilité que cette force d’Éros puisse pénétrer et trouver un écho dans la réalité.

 Comme le démontre Hening Khöler la présence de l'autre est nécessaire car on découvre chez lui, des qualités qui nous attirent et pour lesquelles on éprouve de l'amour, elle est indispensable pour cheminer vers la rencontre de soi. "L'amour, nous dit Milan Kundera, c'est  le désir de cette moitié perdue de nous-même". Mais cette moitié de nous-même est-elle perdue ou inconnue ? Devons-nous la rencontrer à travers l'autre ou grâce à l'autre ? quelle est le sens de cette quête ?

Dans leur odyssée au coeur des contes et mythes  ("les cartes de l'enfant intérieur"), Isha et Marx Lener montrent une belle fée qui regarde son reflet dans une marre. Elle y recherche le sens profond de son existence. Cette image n'est pas sans rappeler, dans l'insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera, la quête de Tereza :

 "Elle tentait de se voir à travers son corps. Aussi se regardait-elle souvent dans le miroir. Et comme elle craignait d'être surprise par sa mère, ces regards portaient la marque d'un vice secret. Ce n'était pas la vanité qui l'attirait vers le miroir, mais l'étonnement d'y découvrir son moi. (...) Elle croyait voir son âme qui se révélait à elle sous les traits de son visage. (...)Elle y voyait l'expression fidèle de sa nature. Elle s'y contemplait longuement (...) ne laisser subsister sur son visage que ce qui était elle-même. Y parvenait-elle, c'était une minute enivrante : l'âme remontait à la surface du corps, pareille à l'équipage qui s'élance du ventre du navire, envahit le pont, agite les bras vers le ciel et chante"
L'insoutenable légèreté de l'être, 2e partie L'âme et le corps, Milan Kundera.

Contrairement à Narcisse, dont l'âme a été capturée dans son reflet en châtiment de sa vanité, Tereza et la fée s'unissent toutes deux à leur "soi bien-aimé", cette partie "perdue" d'elle-même qui est tout amour. Elles voient dans leur propre visage, la beauté sacrée de leur divinité intérieure et fondent dans l'immensité de son amour. Cette rencontre intérieure, avec la partie rayonnante et lumineuse de leur être, est une étape importante de l'incarnation, car c'est bel et bien sur terre que nous pouvons découvrir cet "amour de soi" qui "deviendra éternel" nous rendant ainsi un peu plus divin.

Le danger que l'on pressent chez Tereza est de "ne pouvoir être soi-même mais d'être celle que l'autre attend". Elle n'ose pas se regarder et s'aimer en toute légitimité comme si le jeu était interdit et que cette recherche d'elle-même pouvait être dangereuse.  Pourtant "Etre amoureux de soi" est un état d'être qui vécut, dans la légèreté et la joie, rend plus heureux et souvent courageux. Il éloigne l'être du poids de la solitude et lui donne une belle légitimité d'existence.

Le vrai danger est de refouler ce sentiment et de vivre dans la peur de ne pas être aimé tel que l'on est. Cette crainte profonde peut amener l'être à l'autodestruction ou jusqu'à se fondre dans le regard de l'autre et en perdre son identité. Si nous avons besoin de rencontrer la beauté de l'autre, il faut être suffisamment confiant et aimant par rapport à soi-même afin de ne pas s'égarer. L'amour de soi devient ici le "garde-fou" qui protège des méandres de la vie, de ses pièges et permet de dépasser un grand nombre de ses vicissitudes.